Baroque & Bulles – L’interprétation musicale historiquement informée

Conférence musicale - L’interprétation musicale historiquement informée

Par Xavier Claverie-Rospide,
Président d’Aube Musique Ancienne

Durant de nombreux siècles, les musiciens ne se sont pas posé la question de savoir comment jouer une musique antérieure à leur époque. A cela 2 raisons essentiellement. D’une part, la musique jouée dans les cérémonies civiles ou religieuses étaient majoritairement de la musique de leur époque ; d’autre part, pour diverses raisons, ils estimaient que les règles d’interprétation de la musique étaient également soumises au principe général de progrès, reléguant les modes d’interprétation antérieurs à un domaine d’imperfections peu digne d’intérêt.

Nonobstant, de tous temps, des musiciens, mélomanes, historiens – la musicologie et les musicologues n’existent pas avant le début du XX siècle - se sont intéressés à l’histoire de la musique. Mais il faudra attendre le 1er quart du XX siècle pour que soit questionné l’intérêt du lien entre la musique et ses règles systémiques ayant présidé à sa création.

Par un heureux hasard, au milieu des années 1950, une poignée de musiciens ont concomitamment la conviction que la musique des siècles passés est magnifiée lorsqu’elle est interprétée selon les règles ayant cours à l’époque de sa création. Ils se rencontrent à Vienne, essaiment à Amsterdam, Bâle, Paris, Oxford, Cambridge, Bruxelles …

Depuis, il n’est plus possible d’envisager une unique façon de jouer la musique « ancienne » et la démarche qui, à ses débuts, ambitionnait une « interprétation authentique » s’est mue en une interprétation historiquement informée qui ne concerne plus seulement les œuvres antérieures au XIX siècle mais également celles du XX siècle.

La démarche suscite depuis son origine des critiques mettant en doute la qualité des interprètes accusés de jouer faux sur des instruments « d’époque » et de rendre la musique pauvre, sans âme ni sensibilité. Les auteurs de ces attaques restent minoritaires face à un public de mélomanes rapidement conquis par cette nouveauté qui permet des tempi plus rapides et ressuscite des œuvres de compositeurs injustement oubliés.

L’interprétation historiquement informée n’est pas seulement affaire d’instrument ou de tempo ; c’est surtout une démarche qui englobe une meilleure connaissance des théories musicales, de l’organologie (la science des instruments), de la rhétorique, de la liturgie.

Nul besoin d’être musicien ou musicologue diplômé de l’université pour comprendre ce phénomène culturel et peut-être (plus) apprécier la musique ancienne.